Claude Revel, esprit critique et décence commune

Claude Revel est présidente du GIE FRANCE SPORT EXPERTISE, Directrice du think tank SKEMA PUBLIKA, Administratrice CLASQUIN, Présidente Information & Strategies. Ce portrait a été publié le 25 mars 2022.

Pour connaître la remarquable trajectoire de Claude Revel, il suffit de consulter le Who’s Who. Mais comme l’écrit un jour Simone Weil, « ce que je sais de vous m’empêche de vous connaître ». Il nous fallait donc rencontrer Claude Revel en ne sachant d’elle rien ou presque.

C’est dans les salons feutrés du Cercle de l’Union interalliée que nous reçoit, comme chez elle, Claude Revel, veste en velours moiré chic et col roulé, afin de se dévoiler un peu, même si la pudeur et l’humilité semblent assez vite l’en distraire.

Claude Revel est née d’un creuset de cultures. Sur ses quatre grands-parents, trois avaient quitté leur patrie maternelle. Deux grands-parents italiens, et un grand-père Algérien, berbère pour être exact. C’est à Nice qu’ils se sont tous rencontrés. Mais c’est à Conakry qu’est née Claude et c’est à Dakar qu’elle a passé ses dix premières années, comme une marque de prédestination pour l’horizon international. Nous l’écoutons attentivement évoquer ses origines modestes, dans l’atmosphère cossue du Cercle. Son papa a commencé dans la vie comme mécanicien, sa maman, secrétaire de direction. Tous deux nourrissaient beaucoup d’intérêt pour l’actualité internationale et lisaient abondamment. Très tôt, ils lui communiquèrent cette soif précieuse de culture et de connaissance. Mais le plus beau cadeau que Claude Revel reçut sans doute de ses parents fut une grande indépendance intellectuelle, solidement fondée sur un esprit critique. Ce à quoi il convient d’ajouter,  à la place de notre invitée, un certain goût de l’effort qui a structuré son ascension sociale. « Je suis un pur produit de la méritocratie » confirme t-elle, avec, dans le regard et dans la voix, quelque chose du devoir accompli.

Les études qu’elle entreprit la firent rapidement entrer de plain pied dans un milieu bourgeois, dont elle adopta vite les codes sans jamais rien abandonner de sa liberté de pensée.

Science Po d’abord, des études de droit des affaires à Nice et Assas, puis elle intègre l’ENA en 1980, sans trop savoir à quoi cela la destine. Tous ses homologues ou presque entendaient depuis l’âge de 4 ans « tu seras inspecteur des finances ». Claude Revel ne savait pas du tout ce que c’était en entrant dans l’école.  Sans doute était-elle cependant déjà animée de ce mélange assez romantique de souci du bien commun, de disposition à la prise d’initiative et d’attachement à la nation.

Le haut fonctionnaire insiste sur ce dernier point. « Je suis particulièrement sensible à l’idée de nation et aux principes républicains. Et cela tient sans doute au fait qu’à mes yeux, liberté et souveraineté vont de pair. » En fallait-il beaucoup plus pour faire un haut fonctionnaire digne de sa mission ?

C’est que le champ lexical de Claude Revel, comme disent les analystes politiques, regorge de termes oblatifs, tels que « loyauté, exemplarité ou encore courage », dont elle déplore que ce soit sans doute aujourd’hui « la qualité la moins bien partagée ».

Claude apprécie particulièrement les cours de sciences politiques. A l’ENA, elle développe le goût du service de l’intérêt général que matérialise l’Etat, et que nourrit un patriotisme assumé, qu’elle relie sur le moment à son histoire familiale. « Mon grand-père algérien s’est engagé et battu dans les Dardanelles, un grand oncle niçois a perdu la vie à 19 ans en août 14 dans un champ de blé en Alsace ».

Dès la sortie de l’ENA, la carrière de Claude Revel part en trombe pour ne plus s’arrêter. De 1980 à 1989, elle sert trois ministères différents comme administrateur civil : l’Equipement (Direction de la Construction, contrôle des activités financières des entreprises disposant de crédits publics ), le Commerce extérieur (DGA de l’ACTIM ancêtre d’Ubifrance), puis les Affaires étrangères (Information scientifique et technique). C’est au Quai d’Orsay qu’elle attire vainement l’attention des pouvoirs publics sur la nécessité de valoriser l’information scientifique et technique pour les entreprises. Mais elle est en avance sur l’état d’esprit de cette époque et ne parvient pas totalement à faire émerger cette prise de conscience. Voilà bien un coup de pinceau assez évident dans ce portrait, le côté pionnier ou visionnaire de Claude Revel.

De 1989 à 2003, Claude Revel crée et dirige l’OBSIC (Observatoire du marché international de la construction) structure d’intelligence économique internationale mutualisée entre majors du BTP français. Peu après,  elle prend concomitamment la direction générale du SEFI (Syndicat des Entrepreneurs Français Internationaux), centre d’advocacy des mêmes avec les organisations internationales mondiales. Puis en même temps en 2000, elle assure également la direction générale de la CICA (Confederation of International Contractors’​ Associations), association mondiale des entrepreneurs de construction et infrastructures.

Dès 1991, Claude Revel produit pour ses entreprises un rapport de 35 pages sur la concurrence chinoise en Afrique. Elle tente aussi d’alerter l’opinion publique sur l’effort d’influence économique américain à l’international, en diffusant un rapport qui deviendra une base de son livre (en coauteur) « L’autre guerre des Etats-Unis » en 2005. De même le fait-elle sur les enjeux pour notre pays de la gouvernance mondiale en cours avec un autre ouvrage en 2006. . . Elle prend alors conscience du rapport analogique qui existe entre ce que l’on appelle aujourd’hui l’intelligence économique et le Renseignement. Collecte, analyse, recoupement, tri, validation, etc. C’est là peut-être l’un des axes majeurs de la carrière de Claude Revel : l’intuition que rien ne dispose mieux au succès de l’action que la récolte et le raffinement de l’information.

C’est bien la raison pour laquelle, de début 2004 à fin mai 2013, Claude Revel crée et développe IrisAction, une structure d’intelligence et influence professionnelles internationales (que Claude Revel dissout de manière anticipée début juin 2013, lors de sa prise de fonctions dans l’administration). Elle assure alors également des fonctions de professeure affiliée en intelligence économique et stratégique et de directrice du Centre Global Intelligence & Influence de SKEMA Business School (elle met fin à ces dernières fonctions au 30 mai 2013, pour les mêmes raisons).

Du 30 mai 2013 au 26 juin 2015, Claude Revel est appelée comme déléguée interministérielle à l’intelligence économique auprès du Premier ministre français. Une consécration en quelque sorte !

Elle est ensuite Conseillère maître en service extraordinaire à la Cour des comptes de 2015 à 2019.

En décembre 2019, elle recrée une structure propre baptisée Information & Stratégies. Depuis le 2 janvier 2020, elle est présidente du GIE France Sport Expertise, directrice du développement du think tank SKEMA PUBLIKA et administratrice indépendante de la société de logistique internationale Clasquin. C’est la portée internationale et la préoccupation opérationnelle de PUBLIKA qui l’ont séduite. Le Think Tank vient de publier un rapport d’envergure, EYES (Emergy Youth Early Signs) qui recense et décrypte des préoccupations d’ordre politique des jeunesses du monde. « C’est une étude dont l’objectif est de doter les pouvoirs publics et privés dans le monde d’un certain nombre de clefs de réflexion, que nous allons développer en moyens d’actions concrets, d’outils opérationnels, par exemple pour aider à la formation de l’esprit critique, bien délaissée aujourd’hui » explique Claude Revel.

Voilà pour la matière des grandes dates. Mais s’agissant de l’esprit ? « Je crois bien dans une forme d’intelligence supérieure, à laquelle je ne donne pas de nom ». Nous n’en saurons pas plus. Qu’est-ce qui vous tire du lit le matin, qu’est-ce qui irrigue votre vie, poursuit-on. « J’aime l’idée d’Orwell, de ‘common decency’. Il est donné de cette notion une définition bien claire dans un ouvrage. (Références ici) : « La décence ordinaire repose sur les vertus de base toujours reconnues et valorisées par lhumanité. Elle revêt un statut transversal par rapport à toute construction idéologique et détermine un ensemble de dispositions à la bienveillance et à la droiture et constitue lindispensable infrastructure morale de toute société. »

Plus que tout, Claude Revel a souhaité par ses multiples engagements protéger les libertés, « à tout prix, et même de manière collatérale ». « Nous devons préparer le monde de demain pour nos enfants, tous les enfants, poursuit-elle. Il nous faut pour cela lutter contre les rapports de force animale, protéger toutes les formes de faiblesse et la dignité humaine. » L’entretien se clôt sur cette question : Y a-t-il une menace qui vous inquiète en particulier ? « Oui bien sûr. Je suis vent debout contre la prise de pouvoir sur nos vies par des géants multinationaux du numérique, non élus, sans notre consentement éclairé, à l’aide de technologies qui séduisent et sont peu à peu rendues obligatoires. Je vais me battre plus que jamais, par les idées car je crois qu’elles mènent le monde, contre une société proposant un pseudo bonheur formaté et sécurisé contre un contrôle individuel total y compris sur la pensée.  Je crains que certains de leurs dirigeants n’aient un agenda. Et je crois bien, hélas, que ça n’est pas le nôtre. Seul le développement de l’esprit critique et citoyen dès l’enfance peut nous éviter le pire » 




Les marins sont naturellement disposés à créer des entreprises pérennes.

Grégoire Germain est CEO d’HarfangLab. Ce portrait a été publié le 28 février 2022.

« C’est curieux, chez les marins, ce besoin de faire des phrases.. » Eh bien figurez-vous que Grégoire Germain n’en fait finalement pas tant que ça. La première impression – trompeuse – à son contact est sans doute l’impassibilité. De stature imposante, l’encolure enveloppée d’un chèche, l’ex-marin répond aux questions qui lui sont posées avec le grand calme dont il fit sans doute montre en son temps, alors qu’il était « à la manoeuvre ». Mais dès qu’il se met à raconter son histoire, affleurent évidemment la passion, les traits d’esprit et même l’émotion.

Grégoire Germain est issu d’une famille de militaires de l’armée de terre. Son grand-père l’était en 14-18, son père, aussi, ancien d’Indochine et d’Algérie, général issu de St Cyr, son frère, général itou made in Coëtquidan. « Moi dans cette histoire, je suis le vilain petit canard, qui est devenu marin, » confesse-t-il avec un large sourire. Et pourtant, il ne se destinait pas à cet horizon. « J’étais porté sur la mécanique, l’électronique et le scoutisme. Je ressentais le besoin de comprendre comment marchent les choses. D’ailleurs ma revue préférée, c’était Comment ça marche ! » Grégoire a donc assez logiquement poursuivi des études scientifiques. Mais il fut vite « rattrapé par la Marine », qui conjugue à ses yeux la promesse du voyage, la compagnie de la mer (lui qui plonge et pratique la voile depuis l’âge de 16 ans) et la proximité avec cette arme technologique complexe et redoutable que constitue un bâtiment de guerre!

Grégoire Germain a été et demeure officier de Marine. Voilà ce qui a, de son propre aveu, posé en lui ses solides fondations. La mer, n’est-ce pas aussi cet absolu visitable qui l’amène à nous dire spontanément qu’il a « la foi » ? La philosophie revêt selon lui autant d’importance pour le marin que les maths en possèdent pour les ingénieurs. La mer a tout comblé chez l’officier : le goût du temps long, la soif d’absolu et même…L’âme de l’entrepreneur « civil » qu’il allait devenir.

Ingénieur, il entre sur titre à l’Ecole Navale après un an dans l’offshore pétrolier sur des navires poseurs de câbles sous-marins. Entre deux tranches de vie, notre interlocuteur prend le temps d’invoquer des valeurs humaines qui ont constitué les soubassements de son parcours et qui sont celles de la marine: honneur, patrie, valeur, discipline…

Un bateau, nous explique-t-il, c’est d’abord une forme d’organisation qui est parfaitement transposable dans le civil, et qui repose sur le distinguo organique / opérationnel. Un navire de combat repose sur un mode de fonctionnement matriciel. Il y règne une grande liberté au sein de chaque micro-entreprise que représentent les rôles de l’équipage. Le cuisto gère sa cuisine, ce qui ne l’empêche pas de faire usage d’une mitrailleuse aux côtés de ses compagnons de bord, le cas échéant. Un commandant, c’est quelqu’un qui est capable de parler à chacun son langage, hors du schéma hiérarchique pyramidal. « Nous reproduisons cela chez HarfangLab, explique son fondateur. Il y a chez nous une multitude de petits cercles autonomes qui sont porteurs de redevabilités vis-à-vis des autres cercles. C’est une forme d’holarchie dont il s’agit de bien fixer les règles et les limites ».

Il est bien compréhensible que le marin soit devenu chef d’entreprise quand il évoque la « connaissance intime des Hommes » qui réside au cœur de tout vrai management. Il a aussi cette très belle expression pour désigner sa manière de diriger : « on commande d’amitié ». Cela demeure étonnant d’entendre un officier de Marine chanter les louanges de l’agilité du modèle startup. Se serait-on fait un peu vite une image caricaturale de ce métier habitué pourtant à évoluer sur des océans de fluidité ? Il insiste cependant sur le fait qu’il ne s’agit là que d’outils. Et qu’à l’instar de tout outil, ils peuvent fort bien être utilisés à mauvais escient. « Les méthodes scrum, agile, l’holacratie… Il est une certaine manière de les appliquer qui peut être infernale. Cela peut facilement devenir une main de fer dans un gant de velours. »

Des mers à l’entreprise, n’y aurait-il qu’un pas ? Grégoire Germain le soutient. « Les marins sont naturellement disposés à créer des entreprises pérennes » affirme-t-il. Peut-être faudrait-il modéliser ce passage d’un univers à un autre, pour le plus grand bien de notre économie ?

Vient la question du parcours, et le marin nous fait monter à bord de ce son long périple. Il a connu, dit-il, « de nombreux bâtiments ». Il a commencé par mener des opérations de police de pêche à bord de l’Albatros. « C’est là que j’ai appris à devenir marin » lâche-t-il. « J’ai vécu des assauts de bateaux, navigué en pleine tempête avec des creux de quinze mètres, croisé des icebergs… »

Il intègre ensuite une frégate de surveillance, le Germinal. Il y connaît ses premières expériences du feu, mène beaucoup d’opérations, fait le tour de l’Afrique. Puis il se retrouve à bord d’une frégate de premier rang, à bord de laquelle il assume les fonctions d’officier de manoeuvre. « J’ai toujours été bon en manœuvre, dit-il.  Il y a une certaine aura attachée à la fonction. L’officier de manœuvre, c’est un peu celui qui est chargé de garer le bateau ! C’est la honte si vous le garez de travers ! »

Grégoire Germain commande ensuite un patrouilleur à Tahiti. Il se remémore un sauvetage auquel ils ont procédé alors. Partis des Îles Marquise jusqu’à l’Equateur pour sauver deux vies qui avaient lancé un signal d’alerte avec une pauvre radio HF.

Il devient plus tard instructeur sur « la Jeanne », une « véritable ambassade flottante ». Il y développe notamment sa spécialité qui relève de la maîtrise des systèmes d’information. C’est à cette époque aussi qu’il participe à des opérations de secours des populations en Indonésie, endeuillé par le tsunami. Il prend notamment la tête du détachement qui est parti à terre, avec des légionnaires. Il y fait de la coordination de secours. « Un tsunami, ça ne fait pas beaucoup de blessés. Ça fait des morts et des déplacés… » Il faudrait être aveugle pour ne pas percevoir dans la relation sobre qu’il fait de l’événement, la charge d’une émotion jamais vraiment quittée depuis. Le lecteur se souvient que le sujet de ce portrait a le goût des voyages. La deuxième année sur la Jeanne, Grégoire Germain la passe comme officier de manœuvre et réalise un rêve à cette occasion. On sentirait presque les embruns quand il raconte son « tour de tous les chenaux de Patagonie » ou encore le franchissement du Cap Horn.

C’est sur la Jeanne, où il est instructeur, qu’il rencontre Marc de Briançon, qui en assure le commandement. « Tous ses officiers et adjoints adoraient ce Pacha. Il n’était pas porté sur la communication, mais il était d’un calme olympien. Et il y avait un petit côté Crabe-Tambour quand en pleine tempête, propre ou figurée, il lançait très calmement le fameux : Le commandant prend la manoeuvre. Je ne l’ai jamais vu paniquer. C’est un modèle pour moi. Mais quand on est pacha, et c’est quelque chose que j’ai expérimenté puisque j’ai commandé deux bateaux, il y a quelque chose qui ne s’explique pas, c’est une forme de sixième sens, que permettent la formation et la culture de la Marine. »

Il prend par la suite le commandement adjoint opérations d’une grosse frégate antimissile « Le Duquesne ». Arnaud Coustillière, qui est pacha du bâtiment, le fait après venir à l’Etat-Major de la Marine. Mais il ressent le besoin de passer à autre chose et suit simultanément un MBA exécutive à HEC, avec son actuel associé et CFO Xavier Boreau. Il projette de monter un opérateur Télécom, mais Free débarque et cela le dissuade d’aller plus loin. On lui propose un peu plus tard que le commandement du Dupuy-de-Lôme, qui est un bâtiment de renseignement électromagnétique au service des directions du renseignement : « Un commandement, ça ne se refuse pas et c’était génial ». Un de ses prédécesseurs, Henri d’Agrain, avait fait la « croisière jaune ». Et le nouveau pacha n’a qu’une seule envie, faire la même chose ! Ce qu’il fait pour son plus grand bonheur.

Vient ensuite la guerre en Libye, qu’il évoque avec beaucoup de discrétion. Mais la France, dit-il, a été « la première à y faire des choses pas mal. »

Le marin raconte encore, amusé, un épisode au cours duquel il est allé « chatouiller l’oreille de l’ours russe ». Mais motus pour le détail de la bravade.

Il se décide à quitter la Marine. Mais il est recruté pour structurer les opérations d’une capacité de lutte informatique. Il y découvre un peu mieux le monde de la cyber, par le côté offensif, y apprécie la pratique du hacking, dont il était déjà familier (sur Minitel, à l’âge de quinze ans !). Il y mène des opérations d’appui « assez incroyables », à toutes les heures du jour et de la nuit, très proche du terrain.

A 45 ans, après 21 ans de bons et loyaux services dans la Marine dont plus de 16 « à la mer », Grégoire réfléchit à une deuxième carrière, essaie de racheter une entreprise, mais part finalement chez Thales comme directeur de l’offre Cybersécurité. L’idée qui le motive déjà pour la suite – pour cette entreprise qu’il ambitionne de créer tient dans le renversement des outils informatique offensifs en capacité de cyberdéfense, ce qui caractérise aujourd’hui les EDR (Endpoint Detection and Response).

Il envisage de matérialiser cette idée avec Thales. Mais y manquent selon lui des conditions d’agilité nécessaires au bon développement d’un projet en phase avec le marché. Il s’en ouvre à Pierre Jeanne, qui est son supérieur hiérarchique. C’est à ses yeux « un super manager, qui a des moyens, qui prend des risques, un amiral, un ami pour tous ceux qui le connaissent et le côtoient. » Pierre Jeanne l’aide donc à monter HarfangLab.

Grégoire Germain démissionne de Thales et consacre une longue période de chômage, toutes ses économies et l’héritage paternel à la création de son entreprise. Ils étaient quatre au départ. Quatre années plus tard, ils sont cinquante. « Ça valait le coup ! » conclut-il. L’entretien se finit pêle-mêle avec des questions à la Proust, dont émanent des lectures comme – ce qui ne surprendra personne – la Mer Cruelle de Nicholas Monsarrat, mais aussi Le Grand Meaulnes qui a marqué son enfance ou le philosophe Fabrice Hadjadj qui inspire sa mission père de famille. Une musique ? ose-t-on fort opportunément, avant d’écouter cette réponse. « Oui, l’une des Gnossiennes de Satie. C’est une image du temps long, des grands espaces, lorsque vous naviguez au large des terres australes, et que le bateau se balance sous la neige, en silence, au gré des lentes ondulations de la mer. »

C’est donc bien qu’il en faisait. Des phrases. Merci Commandant !